L'INTERVIEW : NOODLES COMPOSE LA B.O. DE MON LIVRE
Dernière mise à jour : 11 juin
C’est un rendez-vous particulier aujourd’hui puisque je réalise une interview de NOODLES, auteur-compositeur-interprète qui a produit un EP de trois titres, intitulé « A PART OF ME », disponible sur toutes les plateformes d’écoute. Cette création est réalisée à l’occasion de la parution le 10 juin 2024, aux Éditions Récits, de mon premier roman autobiographique illustré : « LE REIN DU CŒUR ».
Dans cette interview il est question d’inspirations, de culture musicale éclectique, de processus créatif et de confiance en sa capacité de créer malgré les contraintes.
Un échange passionnant et inspirant.
Merci NOODLES pour ce que tu as créé avec ton EP « A PART OF ME » et merci de te prêter au jeu de cette interview. Je souhaitais vraiment mettre en lumière la qualité du travail artistique que tu as accompli dans le cadre de la parution du roman « LE REIN DU CŒUR ». Mais avant d’aborder ton travail sur cet EP, j’aimerais revenir sur tes inspirations et sur ce que tu aimes particulièrement partager avec ton public : les reprises musicales. Est-ce que tu peux nous en dire plus ?
Merci à toi de m’avoir proposé cette interview.
Comme tu le sais, les reprises de chansons me passionnent depuis tout petit. Je faisais déjà des reprises au piano voix à l’âge de 10 ou 11 ans. J’ai toujours adoré interpréter les chansons que j’aimais écouter. À l’époque, je reprenais au piano de la variété française ou des morceaux pop grand public. Puis vers la vingtaine, je me suis ouvert à davantage de styles musicaux, grâce à ma sœur qui m’avait offert un abonnement au magazine Les Inrockuptibles. J’ai découvert des artistes et des musiques d’horizons différents, certains très connus, d’autres plus confidentiels. Mes inspirations se sont élargies.
Tu chantes toujours beaucoup de reprises pendant tes concerts. Quels sont tes titres favoris du moment ?
C’est tellement varié ! Variété, rock, pop, classique… J’ai un catalogue de plus de 700 titres que je mets à disposition des personnes présentes et elles choisissent ceux qu’elles souhaitent entendre.
Dans tous les cas, j’aime faire des reprises d’artistes qui ont des univers bien particuliers. En ce moment il y a notamment Zaho de Sagazan, que j’ai vue en concert. C’est une artiste incroyable qui mélange l’électro, la chanson française… J’aime également Hoshi pour sa personnalité et le vécu qu’elle partage dans ses textes ; Florent Marchet, un chanteur français qui écrit de très beaux textes. J’aime aussi Rosalia, une chanteuse espagnole ; des groupes de rock vintage comme Komodrag and the Mounodor, qui sont bretons. Et puis beaucoup d’autres comme Benjamin Biolay, Charlie Winston ou encore le chanteur français Voyou.
Tu aimes particulièrement chanter en public. J’ai déjà assisté à tes concerts et j’ai l’impression que c’est vraiment un pur moment de plaisir pour toi.
C’est tout à fait ça. Un pur plaisir. La simplicité du partage. J’adore jouer dans les bars, même s’il n’y a qu’une vingtaine de personnes. J’ai commencé à chanter en public vers l’âge de 16 ans. Je n’ai jamais cherché à aller plus loin que de chanter dans des bars ou des fêtes de la musique parce que c’est ça qui me plaît avant tout : le pur plaisir de chanter et de partager.
J’adore reprendre des chansons que les gens connaissent et les leur proposer dans des versions différentes. Et j’aime être surpris par les choix des gens. Il y a des titres qui sont régulièrement choisis. Et il y en a d’autres que je ne pensais pas susceptibles de l’être et que, pourtant, on me demande.
Il y a les reprises mais tu crées également tes propres compositions. On peut citer « Run or fall », « Les heures perdues », « Our better days » ou encore « Still at it ». Un mélange de titres acoustiques et d’autres plus rock. Quels sont les thèmes qui t’inspirent particulièrement ?
Les thèmes qui m’inspirent peuvent être liés à l’actualité. C’est le cas pour « Le piège » qui évoque l’attentat de Charlie Hebdo, ou encore « Run or fall » qui traite des boat people en Méditerranée. Avec ma chanson « Aussi doucement », je voulais aborder le thème du temps qui passe de plus en plus vite. Quand on est au collège, l’année paraît interminable. Aujourd’hui une année scolaire se termine et j’ai l’impression que la rentrée, c’était hier. La chanson « Still at it », quant à elle, parle des militants écologistes. Je trouve ça impressionnant, ces personnes qui se battent malgré tout, alors que l’on sait qu’on ne pourra probablement pas sauver la planète. Eux, ils sont toujours là, ils continuent. Je les admire et ça m’a inspiré.
Beaucoup de compositions en lien avec l’actualité ou des questions universelles mais pas de chanson d’amour par exemple ?
Je n’ai pour l’instant pas écrit de véritable chanson d’amour. J’aurais du mal. Sûrement par pudeur. Mais j’aime composer sur des thèmes plus intimes et personnels. « Les heures perdues » parlent des angoisses auxquelles on est confronté la nuit. « Our better days » parle du fait d’être en couple et de vieillir ensemble. « Road on fire » a pour thème un jeune homme qui prend son envol et qui part faire sa vie quand tout s’ouvre à lui. C’était l’époque de la fac. Et puis, il y a « Comfort song », une chanson que j’ai écrite lorsqu’une personne de mon entourage a subi un deuil. Je ne trouvais pas les mots pour la réconforter alors j’ai composé.
Tu composes sur des thèmes intimes et personnels mais, parfois, plus c’est intime plus cela devient universel.
Oui c’est ça. Et quand on compose, même si cela part de quelque chose de personnel, on espère que ça parlera, malgré tout, au plus grand nombre possible.
Beaucoup de tes compositions sont en anglais mais tu écris aussi en français. C’est finalement à l’image de ta culture musicale ?
Je pense oui. Pour ma part, écrire en anglais est beaucoup plus facile qu’en français. Chaque composition demande beaucoup de travail, mais pour moi, ça passe mieux niveau sonore en anglais, au niveau du rythme, de la mélodie. Enfin, c’est l’impression que cela me donne ! J’ai du mal à avoir du recul sur mes propres compositions.
Composer en français, c’est plus dur. Il y a déjà tellement de grands chanteurs français avec des textes superbes. Pour moi, c’est difficile d’être totalement satisfait d’un texte en français.
Oui, et puis en français on ne peut pas tricher avec la langue ou le message.
Exactement. Quand la chanson est en anglais, le public français fait généralement moins attention aux paroles. Même si je travaille beaucoup mes textes. En français cela demande une autre exigence. Par exemple, pour ma composition « Aussi doucement » j’ai tenté d’être très concis et aller à l’essentiel.
On ressent vraiment en t’écoutant que chaque mot, chaque rythme est pesé. Est-ce que c’est un travail conscient de ta part : trouver la composition parfaite pour traduire le message que tu veux faire passer et l’émotion ?
Oui c’est conscient et j’essaie de faire au mieux. Cela me prend beaucoup de temps de créer.
Notamment avec tout ce qui concerne le placement vocal de la mélodie, à l’échelle des syllabes. Mais il y a aussi une part d’instinct, le sentiment que ce que je crée sonne bien. Il y a aussi toute mon expérience des reprises. Quand je trouve une mélodie, c’est un mélange de ce qui m’inspire et de ce que j’arrange. Tout se mélange.
Oui et c’est comme cela que tu crées ton propre univers.
Oui c’est ça.
Comment crées-tu et qu’est-ce que tu ressens lorsque tu crées tes compositions ? Est-ce que c’est une expérience légère, un moment d’introspection avec toi-même, une obsession ?
Mes premières compositions étaient pour le groupe rémois SHIVAMOON avec lequel je continue de faire des concerts. Ma première composition en solo était « Our better days ».
J’ai souvent du mal à m’y mettre, il faut que je me force. Mais quand je commence, cela devient obsessionnel. Je me plonge dans ma composition dès que j’ai un moment de libre. Cela me prend énormément de temps de faire une seule composition, donc c’est pour cela qu’il n’y en a pas beaucoup de disponibles.
Je commence toujours par la musique parce que c’est ce qui est le plus facile pour moi. J’improvise au piano ou à la guitare et je fredonne des mélodies par-dessus, que j’enregistre sur mon téléphone. Je pose quelques phrases en « yaourt » dessus qui me viennent naturellement en anglais ou en français. Je me retrouve avec plein de bouts de mélodies et d’enregistrements. Je les écoute ensuite. Un jour je les trouve super, un autre jour je les supprime car les mélodies ne me semblent pas si intéressantes. Et puis, à force d’en écouter certaines à plusieurs reprises, je me dis : « Ah tiens, elle est pas mal celle-là. Il y a peut-être quelque chose à faire avec. »
Alors je construis la chanson musicalement, sans les paroles mais avec la structure, toujours en mode « yaourt ».
Et puis, en dernier, le texte. Pour moi, le plus dur ce sont vraiment les paroles. Être devant la feuille blanche avec la mélodie et se demander : Que dire ? Comment le dire ? Comment faire pour que ça colle avec la mélodie, que ça rime… Donc généralement les paroles et le sujet me viennent en dernier.
Qu’est-ce que tu ressens quand tu achèves une composition ?
Déjà quand le texte est fini, c’est une énorme satisfaction. Un plaisir que je ne retrouve nulle part ailleurs, c’est assez particulier à décrire. Ensuite il y a l’étape de l’enregistrement et des arrangements. Quand j’en suis arrivé là, je ressens à nouveau une satisfaction immense.
Quelles sont les compositions qui te donnent toujours autant ce sentiment de satisfaction aujourd’hui ?
Je dirais « Run or fall », « Our better days » et une composition que j’ai faite pour le groupe SHIVAMOON « Insignificant ».
Alors, ta recherche des mots justes et de l’émotion qui touche en plein cœur, j’en ai fait personnellement l’expérience avec la collaboration que je t’ai proposée. Celle de créer la bande originale du livre « LE REIN DU CŒUR », à l’image de la bande originale d’un film. Je me souviens que lorsque je t’ai présenté ce projet, tu n’as pas d’emblée sauté de joie, tu étais curieux mais aussi soucieux, n’est-ce pas ?
Oui. Au début, c’était intimidant car je n’avais jamais eu de commande de composition auparavant. Je créais pour moi-même. Avec ce projet pour ton livre, je devais travailler sous la contrainte, avec un sujet imposé et des délais à respecter. Je ne savais pas si j’en étais capable.
Il y a plusieurs thèmes évoqués dans ton EP « A PART OF ME ». Est-ce qu’ils te sont apparus au fil de la lecture du livre ou une fois que tu avais terminé la lecture en prenant du recul ?
Dès que j’ai commencé à lire « LE REIN DU CŒUR » je prenais des notes à chaque fois que quelque chose m’interpellait : une tournure de phrase, des mots bien trouvés, un propos intéressant. Je notais tout.
Quand j’ai eu fini la lecture, j’ai repris mes notes. Je me suis replongé dans des passages. C’est comme ça que j’ai identifié trois thèmes qui m’inspiraient. Premièrement, avec la page centrale (cf page 129). Cela m’a directement inspiré « A PART OF ME », dont les paroles reprennent pour beaucoup tes mots. Ensuite, c’est la notion de monde blanc (en référence au monde hospitalier) qui m’a interpellé et inspiré. Et puis le conflit entre le cœur et l’ego qui revient souvent dans ton roman. Je n’y avais jamais pensé de cette manière et je trouve cette approche intéressante. D’autant plus que l’on peut en faire l’expérience dans beaucoup de domaines de notre vie.
On parlait de la force de tes textes et de l’émotion dans tes compositions musicales. Les trois titres de ton EP, « A part of me », « White world » et « Le cœur et l’ego » ont chacun leur univers. Comment décrirais-tu ces trois univers et ce que tu as voulu transmettre à travers ces compositions ?
Pour le titre « A part of me », j’ai eu rapidement les premiers couplets et puis plus rien. J’aimais le départ acoustique mais j’avais envie de quelque chose d’autre. J’ai tenté un accord très fort et cela m’a décidé à aller vers un moment plus rock, avec chœurs et violons. Pour enfin revenir sur un registre acoustique. Je trouve que cela correspond bien au cheminement de ton livre : la progression de l’angoisse et puis l’apaisement au fur et à mesure que le temps passe après l’opération.
Pour le titre « White world », je suis tout de suite partie sur une version acoustique à la guitare. J’avais déjà la mélodie car elle m’était venue pendant que j’écrivais « A part of me ». J’avais envie de guitare acoustique avec des effets de réverbération.
Et concernant le titre « Le cœur et l’ego », je trouvais que ces mots ensemble revenaient souvent dans ton livre. Je me suis dit qu’il y avait de quoi en faire un thème de composition. Et puis l’expression « le cœur et l’ego », pour moi cela sonnait bien en français. C’est pour cela que je suis partie sur une version française. L’idée de valse m’est venue rapidement. La valse de la lutte intérieure. Le côté insidieux de cette valse entêtante qui est mis en avant grâce au rythme et aux accords utilisés dans la mélodie.
Une fois les chansons composées, il y a les clips. Là aussi tu les réalises toi-même. Tu crées un clip pour chacune de tes compositions et l’on sent bien que cela constitue une part importante de ta création. Le clip traduit par l’image le message de ta chanson.
Tout à fait. Et puis le format vidéo est devenu essentiel aujourd’hui pour donner envie d’écouter des compositions. Le clip vient vraiment en dernier dans mon processus mais il en fait complètement partie. C’est pour cela aussi que mes compositions prennent du temps. Pour les reprises musicales, je fais généralement un plan fixe où je me filme au piano. Pour mes compositions personnelles, les clips sont plus travaillés et je ne partage pas la composition tant que le clip n’est pas finalisé.
C’est parfois laborieux car je réalise les clips tout seul. C’est à double tranchant. D’un côté je décide de tout, mais d’un autre côté c’est contraignant par rapport aux possibilités en termes de plan caméra. Mais je trouve que les contraintes sont toujours un plus pour la créativité.
On arrive à la fin de cette interview. Ton EP « A PART OF ME » est ton premier travail de création sur demande. Qu’est-ce que cette expérience t’a appris ?
Je me suis vraiment demandé si j’allais réussir à aller au bout de ce projet malgré ses contraintes. Que les chansons soient bonnes ou non, c’est subjectif. Mais objectivement, aller au bout du projet, c’était cela le vrai sujet. Pour tout t’avouer, au départ, j’avais même envisagé la possibilité de te dire au bout d’un mois : « Désolé, j’ai lu ton livre et il n’y a aucune inspiration qui me vient. » Finalement j’ai créé trois chansons ! Avant ton projet, une composition me demandait quatre à cinq mois de travail. Avec cet EP j’ai écrit, composé et enregistré trois titres dans ce même laps de temps ! Cela a vraiment été une surprise pour moi. Donc j’ai gagné en confiance et, surtout, j’ai pris conscience que ce dont je ne me croyais pas capable, je pouvais en fait le réaliser.
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Dates de concert à venir :
Le 21 juin 2024 : Avec le groupe SHIVAMOON à Reims (51) pour la Fête de la musique. Reprises musicales rock.
Le 14 septembre 2024 : NOODLES en concert au pub le Mac Laughlin’s à Beuzec Cap Sizun (29).
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